Le pouvoir d’enquête de la SAAQ

Publié le 3 octobre 2024

SAAQ

Si vous avez recours au régime de la SAAQ (ci-après la Société), sachez qu’il se peut que vous fassiez l’objet d’une enquête ou encore soyez l’objet d’une filature.

Comme elle a le devoir de s’assurer du fondement des réclamations et des indemnités qu’une personne peut recevoir, la Société possède un pouvoir d’enquête en vertu de la loi. Il existe toutefois des limites à son pouvoir.

Qu’est ce que le pouvoir d’enquête de la SAAQ ?

Le pouvoir d’enquête désigne le pouvoir conféré à un organisme, comme la SAAQ, pour mener des investigations et collecter des informations. Celui-ci permet à l’organisme de consulter des documents, interroger des témoins, analyser des preuves et surveiller des activités, afin de recueillir des faits pertinents à une situation donnée. L’enquête peut se faire à travers diverses méthodes.

Respect des droits et libertés

En effet, la Société peut uniquement enquêter en respectant les droits et les valeurs énoncés dans la Charte canadienne, la Charte québécoise et le Code civil du Québec, puisqu’elle doit se fonder sur des principes directeurs, tels que la bonne foi et l’intégrité des personnes.

Il est important de noter que le droit à la vie privée d’une personne n’est pas absolu. En effet, une enquête peut être entreprise malgré le droit à la vie privée que protège ces chartes. C’est pourquoi une enquête ne peut être effectuée, après une ouverture de dossier à la SAAQ, uniquement lorsque des motifs rationnels la justifient et que les moyens utilisés sont raisonnables.

Objectifs de l’enquête de la SAAQ

En fait, l’objectif d’une enquête de la SAAQ est un moyen de promouvoir l’équité de tous au sein du processus de demande d’indemnité. Elle vise à superviser le calcul de l’indemnisation octroyée par la SAAQ en analysant les renseignements fournis et le comportement d’un individu accidenté. De plus, il se peut que cette enquête se fasse au moyen et à l’aide d’une filature. À cet effet, cette dernière doit, elle aussi, être appuyée par des motifs rationnels. Par ailleurs, toute enquête doit être fondée sur la raison, le bon sens et la logique et ne doit pas être basée sur une simple impression. Autant l’enquête que la filature doit se faire de manière la moins intrusive possible et ne doit pas atteindre la dignité de la personne accidentée.

Plus précisément, il est possible pour la Société d’entamer un processus d’enquête lorsque celle-ci a des motifs sérieux de remettre en question les informations divulguées dans la réclamation, de la preuve au dossier, du comportement ou de la condition médicale de la personne ayant subi des blessures contradictoires.

Les types d’enquêtes menées par la SAAQ

La SAAQ utilise plusieurs types d’enquêtes pour vérifier l’exactitude des informations fournies par les assurés. Parmi les méthodes couramment employées, on retrouve :

  • Analyse des documents : Il s’agit d’un examen approfondi des dossiers administratifs, financiers et médicaux. Les enquêteurs vérifient les informations soumises par l’assuré. À cet effet, il peut obtenir tous documents nécessaires à son enquête, notamment des rapports médicaux, des déclarations financières ou des preuves d’incapacité. Cette analyse permet de déceler d’éventuelles incohérences.
  • Entretiens avec les témoins : Cette méthode implique des entretiens avec des témoins ou des professionnels de la santé pour corroborer les déclarations de l’assuré. Les enquêteurs peuvent aussi se rendre sur les lieux de l’accident ou à l’adresse de l’assuré pour obtenir plus d’informations.
  • Filature et surveillance : Lorsque la SAAQ suspecte une fraude ou des incohérences dans les déclarations, elle peut ordonner une surveillance discrète de l’assuré. Cette filature permet d’observer directement les actions quotidiennes de la personne et de vérifier si elles correspondent aux limitations physiques ou déclarations faites lors de la réclamation.

Ces différents types d’enquêtes visent à assurer que les déclarations des assurés sont en conformité avec la réalité des faits et à préserver l’intégrité du régime d’assurance.

Dans quelles situations la SAAQ a recours à son pouvoir d’enquête ou à la filature ?

Comme mentionné précédemment, la Société peut initier un processus d’enquête lorsqu’elle dispose de motifs raisonnables de douter des informations fournies dans la réclamation, des éléments de preuve au dossier, du comportement de la personne ou de la cohérence de son état de santé avec les blessures alléguées.

La Société émettra donc un mandat d’enquête, à un enquêteur certifié. Celui-ci débutera par obtenir des documents et interroger des témoins, pour vérifier les informations au dossier de l’assuré. Une filature peut également être commandé en cours d’enquête.

Comme la filature est manifestement une intrusion dans la vie privée d’une personne, la Société doit s’assurer qu’il s’agit du seul moyen pouvant amasser tous les renseignements utiles à l’enquête. Habituellement, il s’agit d’un moyen de dernier recours. À cet effet, si tel est le seul moyen permettant d’éclaircir la situation, la filature pourra se faire au moyen de surveillance vidéo, d’observation ponctuelle et limitée dans le temps et en lieu public seulement. Par exemple, la filature peut être justifiée si la Société a reçu une dénonciation, s’il y a contradiction lors d’un témoignage de la personne accidentée, si les activités effectuées par cette dernière vont à l’encontre des limitations pour lesquelles elle a reçu des indemnités ou encore lorsque plusieurs expertises n’en viennent pas à la même conclusion.

Démarches de la SAAQ pour entamer une enquête

Afin de faire une demande d’enquête, il est nécessaire pour la Société de remplir le formulaire de Demande d’enquête. On doit y retrouver les faits, les motifs pour lesquels la demande est faite et les moyens utilisés.

Il est important de noter que l’enquête servira à la Société pour rendre des décisions à l’égard de la personne accidentée. Cette enquête pourra également être utilisé comme preuve pour la Société, afin de justifier ses décisions.

Droits et obligations des assurés face à une enquête de la SAAQ

Lorsqu’une enquête est ouverte par la SAAQ, les assurés ont des droits et des obligations à respecter. En termes de droits, l’assuré bénéficie de la confidentialité des informations collectées au cours de l’enquête, qui ne peuvent être utilisées que dans le cadre de celle-ci. Il a également le droit d’être informé des motifs de l’enquête et de consulter le dossier, ainsi que de faire appel à un avocat pour garantir que ses droits sont respectés. D’un autre côté, l’assuré est tenu de coopérer avec les enquêteurs, notamment en fournissant les documents demandés et en répondant de manière honnête aux questions posées. Toute tentative de dissimulation d’informations ou de fausses déclarations peut entraîner des sanctions, telles que la suspension des indemnités ou des poursuites judiciaires. Respecter ces obligations assure un traitement transparent et efficace du dossier durant l’enquête.

Comment se préparer à une demande d’enquête de la SAAQ ?

Se préparer à une enquête de la SAAQ nécessite avant tout une approche proactive et transparente. La première étape consiste à garder une documentation complète et précise de toutes les informations liées à votre dossier : rapports médicaux, documents financiers, correspondance avec la SAAQ, etc. La transparence est cruciale pour garantir que l’enquête se déroule sans encombre.

Ensuite, il est recommandé de consulter un avocat spécialisé dans les litiges d’assurance automobile ou les réclamations à la SAAQ. Un avocat peut vous conseiller sur la meilleure manière de répondre aux demandes des enquêteurs et peut vous représenter en cas de litige.

Assurez-vous également de coordonner avec vos médecins ou autres professionnels de la santé pour vous assurer que tous les documents médicaux sont à jour et concordent avec votre état de santé actuel.

Enfin, coopérer pleinement avec les enquêteurs en répondant honnêtement à leurs questions et en fournissant tous les documents requis. Cette collaboration est essentielle pour éviter tout retard ou complication dans le traitement de votre dossier.

En prenant ces mesures, vous maximisez vos chances de gérer l’enquête de manière efficace et d’obtenir une résolution juste et équitable.

Contester une demande d’enquête de la SAAQ

Si vous souhaitez demander le rejet des rapports d’enquête en preuve, il faudra démontrer que cette enquête a été effectuée par l’entremise de moyens déraisonnables ou sans motif sérieux et ayant de ce fait causé préjudice à vos droits fondamentaux, soit celui du droit à la vie privée. L’enquête doit donc avoir été effectuée de manière à déconsidérer l’administration de la justice, ce qui la rend irrecevable en preuve.

Pour obtenir le rejet de la filature, vous devrez faire la preuve qu’il y avait des moyens moins attentatoires d’atteindre le même objectif. On pourra alors en venir à la conclusion que la filature était en soi un moyen déraisonnable. Il est important que la filature soit une option de dernier recours et que tous les autres moyens aient été infructueux. À cet effet, les tribunaux rappellent qu’un tel processus doit se fonder sur les critères de pertinence et de recherche de la vérité. D’ailleurs, la Société qui fait appel au processus d’enquête doit être de bonne foi dans ses démarches.

Faites appel à un avocat spécialisé en SAAQ pour faire valoir vos droits

Ainsi, si vous croyez avoir été brimé dans votre droit à la vie privée par l’entremise d’une enquête ou d’une filature, notre expertise en la matière pourrait vous être utile. Nous nous chargerons de vous représenter et de défendre vos droits fondamentaux. À cet effet, notre avocate en SAAQ et son équipe juridique pourront contester les décisions rendues par la SAAQ ne reflétant pas votre situation.

Me Sarah-Jeanne Dubé Mercure

Me Dubé Mercure a débuté sa carrière à titre de stagiaire au Bureau d’aide juridique de Montréal-Nord où elle a développé un véritable intérêt pour le droit social. Son désir de représenter et d'accompagner les accidentés l'a mené à faire le saut en pratique privée, où elle a travaillé au côté de Me Jean-Pierre Ménard. Elle a ensuite fondé Le Cabinet M qui se spécialise en droit social et touche également à la responsabilité civile. Parallèlement à la pratique du droit, Me Dubé Mercure est également chargée de cours à l’UQO en santé et sécurité du travail.

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